Vol. 4 No. 2 (2024)
Examens d’une technologie de la santé

Le choix du moment de l’administration de l’antibiothérapie contre l’infection à Neisseria gonorrhoeae

image décorative de la couverture

Publication : February 22, 2024

Messages clés

Quelle est la situation?

  • La gonorrhée occupe le deuxième rang des infections transmissibles sexuellement prévalentes au Canada. Causée par la bactérie Neisseria gonorrhoeae, elle se traite par une antibiothérapie. Au fil du temps, N. gonorrhoeae est devenue antibiorésistante, ce qui a entrainé une perte d’efficacité des antibiothérapies.
  • On peut administrer l’antibiothérapie après un résultat positif au test de dépistage de N. gonorrhoeae, mais en raison des délais des analyses en laboratoire, il y a un risque de perdre de vue le patient au suivi (qui ne retournerait pas à la clinique après l’obtention des résultats d’analyse).
  • L’antibiothérapie probabiliste, aussi dite empirique, est plutôt administrée avant la confirmation d’analyse en laboratoire de la présence de N. gonorrhoeae aux personnes fortement exposées au risque de contracter la gonorrhée ou à celles qu’on risque de perdre de vue au suivi. Cependant, administrer le traitement à ce moment pourrait se traduire par un surtraitement de personnes qui n’ont pas d’infection à N. gonorrhoeae, associé à l’acquisition d’une antibiorésistance et à des effets secondaires chez les personnes recevant les antibiotiques.
  • Il est important de se faire une idée du moment idéal pour instaurer une antibiothérapie en tenant compte à la fois des risques d’antibiorésistance et de la rapidité du traitement.

Qu’avons-nous fait?

  • Afin de guider la prise de décision sur le moment où administrer l’antibiothérapie contre une gonorrhée sans complication soupçonnée chez l’adulte et l’adolescent, l’ACMTS a cherché à repérer et à résumer la documentation comparant l’efficacité clinique et l’innocuité de l’administration de l’antibiothérapie après l’obtention des résultats confirmant l’infection à N. gonorrhoeae (administration différée) et l’administration avant l’obtention des résultats (antibiothérapie probabiliste).
  • Une personne spécialiste de l’information a effectué une recherche des publications avec comité de lecture et des sources de littérature grise depuis le 1erjanvier 2013.

Qu’avons-nous trouvé?

  • Nous n’avons pas trouvé d’études répondant aux critères de l’examen qui évaluent l’efficacité clinique et l’innocuité de l’administration différée de l’antibiothérapie comparativement à l’administration probabiliste chez l’adulte ou l’adolescent. Nous avons retenu deux études non randomisées comparant les taux de traitement approprié et de surtraitement chez les personnes ayant reçu une antibiothérapie probabiliste et chez les autres.
  • Dans les deux études, la proportion de résultats d’analyses confirmant l’infection à N. gonorrhoeae dans le groupe ayant reçu une antibiothérapie probabiliste se situe à moins de 50 %, ce qui voudrait dire que moins de la moitié des personnes de ce groupe auraient reçu un traitement probabiliste approprié. De plus, nous avons constaté des taux de surtraitement élevé, qui vont jusqu’à 90 % dans les études retenues.
  • Le degré de certitude de ces résultats est très faible en raison de limites méthodologiques des études retenues.
  • Nous avons également recensé cinq études à un seul groupe qui examinent ces critères d’évaluation chez les personnes recevant une antibiothérapie probabiliste, dont les résultats concordent généralement avec ceux des deux précédentes études retenues.

Qu’est-ce que ça signifie?

  • Les données probantes disponibles donnent à penser que les taux de surtraitement associés à l’antibiothérapie probabiliste seraient élevés. En outre, les résultats indiquent qu’il serait utile de procéder à une évaluation clinique dans le dépistage de l’infection à N. gonorrhoeae. Nous ne connaissons pas bien les répercussions en aval sur l’efficacité clinique que pourraient avoir ces résultats pour ce qui est de l’antibiorésistance ou de l’augmentation de la propagation de l’infection à N. gonorrhoeae.
  • Il serait utile de tenir compte, dans le choix du moment approprié d’administrer l’antibiothérapie, de certains facteurs contextuels, comme la prévalence à l’échelle locale de l’infection à N. gonorrhoeae et les obstacles au traitement qui pourraient surgir et nuire au suivi chez certaines personnes ou dans certains groupes.